vendredi 23 septembre 2011

André le Magnifique


Théâtre Michel
38, rue des Mathurins
75008 Paris
Tel : 01 42 65 35 02
Métro : Havre-Caumartin / Auber

Une comédie écrite par Isabelle Candelier, Loïc Houdré, Patrick Ligardes, Denis Podalydès, Michel Vuillermoz avec la complicité de Rémi De Vos.
Mise en scène par Didier Caron
Décors de Sébastien Barbaud
Costumes de Nathalie Cognoquatorze plus tard
Avec Didier Caron (André), Didier Constant (Alexis), Jean Fornerod (Norbert), Marie-Hélène Lentini (Janine), Xavier Letourneur (Jean-Pascal Faix)

L’histoire : Pour sauver leur petit théâtre de la destruction, le maire d’un village du Gers et sa femme décident de monter une pièce retraçant l’épopée héroïque du Chevalier Saint-Germaine. Ils engagent alors un comédien professionnel en provenance de Paris pour interpréter le rôle du Chevalier, aux côtés de comédiens amateurs qui sont les employés municipaux…

Mon avis : Attention succès ! Cette pièce créée en 1997 a remporté l’année suivante 5 Molières ‘Meilleur spectacle, Meilleure pièce, Meilleur auteur, Révélation féminine, Révélation masculine) et 2 nominations.
Très bonne idée donc que de la reprendre quatorze ans plus tard avec une toute nouvelle distribution car, de nouveau, la magie opère. Voir et entendre une salle secouée de rires incoercibles est un pur bonheur. Et si cette bouffonnerie hilarante fonctionne, elle le doit au quintette de comédiens qui assurent la relève de leurs glorieux aînés. Ils sont impayables ces cinq là. C’est plus leur jeu que l’histoire qui nous fascine. Chacun dans son registre exécute un numéro de haute voltige. Analysons-les dans l’ordre de leur entrée en scène.

Didier Caron, non content d’assurer la mise en scène, endosse le rôle délicat d’André. Pour le concrétiser il s’est construit de A à Z un personnage. Il marche les pieds en dedans, il est emprunté avec ses bras (il les croise souvent en signe de perplexité), il est hésitant, lunaire, il souffre d’un décroché de mâchoire chronique, mais en même temps c’est quelqu’un de scrupuleux, de foncièrement honnête et qui est plein de bon sens. Il ne faut pas chercher à lui en raconter ou à le mépriser… Dans sa candeur fragile, dans sa totale sincérité, il fait parfois penser à Bourvil.

Didier Constant apporte au personnage d’Alexis, le maire du village et auteur de la pièce, tout son sérieux. C’est un brave homme, profondément humain, tout entier investi dans sa mission. Par la force des choses, il est l’homme orchestre de cette opération sauvetage. Il est aussi très touchant. D’abord lorsqu’il entend les mots qu’il a écrits proférés par un acteur professionnel. Ensuite, quand il croit que son amour est menacé. Il déclenche en nous un réel sentiment de sympathie.

Jean Fornerod est Norbert. Des Norbert comme celui-ci on a tous rencontrés. C’est un employé municipal un peu simple, un homme à tout faire dévoué et plein de bonne volonté, en quête permanente de reconnaissance, mais qui est habité par une susceptibilité maladive. Par son souci d’exister, avec ses initiatives plus ou moins judicieuses, il est aussi énervant qu’attachant.

Xavier Letourneur ne joue pas Jean-Pascal Faix. Il EST Jean-Pascal Faix tant il est impressionnant de véracité (et de voracité). Quelle prestation ! C’est le cabot dans toute sa splendeur. Il est pédant, prétentieux, grandiloquent à en devenir insupportable. Tel un paon, il se gonfle d’importance. Il sait qu’il a une certaine prestance qui en impose à ces « ploucs ». Et puis il a cette voix, organe tumultueux et rugissant qui impressionne ces braves gens. Alors, sans scrupules, il va user et abuser de son aura… Néanmoins, quand il s’aperçoit qu’il a été trop loin, qu’il s’est montré trop odieux, il va parfois faire preuve d’une certaine fragilité.

Seule femme de la pièce, Marie-Hélène Lentini tient un rôle clé. Non seulement Janine est l’épouse du maire, mais elle est aussi la partenaire de Jean-Pascal Faix. Elle a un personnage tout en finesse. Même s’il lui arrive d’être troublée par la cour éhontée que lui fait son creux chevalier, elle garde les pieds sur terre. Avec sa tirade, dont je vous laisse le plaisir de la découverte, elle s’est vue offrir un sacré morceau de bravoure qui frise l’anthologie. On peut parler de véritable performance.

Cette pièce a des accents et des répliques dignes d’un Marcel Pagnol du Sud-ouest. Il y a et l’ezagération et la tendre humanité, le burlesque, le loufoque, et les sentiments. On peut aussi citer quelques effets spéciaux propres aux grosses productions, à savoir des changements de décors à vue et la présence sur scène d’animaux domestiques (une vache) ou sauvages (un ours). C’est dire le budget ! En tout cas, on se paye une sacrée tranche de rire, d’un rire frais et spontané de gamin qui fait vachement du bien. Mais quels comédiens !!!!... Et si les Molières 2012 remettaient ça ? Ce serait magnifique pour André...

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